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Koxeur agriculture transports Sénégal

Koxeur : ce parasite qui tue l’agriculture et le transport au Sénégal

Le mot coxeur est un terme au Sénégal qui désigne l’intermédiaire présent dans le milieu de la commercialisation des produits agricoles et le rabatteur dans le milieu du transport. Regroupant au début d’anciens agriculteurs ou chauffeurs, devenus indigents ou sans moyens pour exercer leur profession, cette corporation a su s’imposer dans les deux milieux, au point d’en devenir des acteurs incontournables. Cependant, le racket qu’ils exercent sur les producteurs comme sur les usagers des transports, fait qu’ils sont critiqués et contestés. Sauront-ils survivre au progrès ?

Dans une société où l’entraide est très présente, le koxeur a su trouver un terreau fertile à ses activités. En effet, sous le prétexte de leur état d’indigence, ils sont nombreux ces vieux et ces jeunes qui exercent dans les gares routières et autres arrêts de cars. Exigeant une commission qui atterrit le plus souvent dans leurs poches et appelée à tort mandat. Ils ne se gênent plus de tenir en laisse les transporteurs. Pour garantir ces rentrées financières, un fin maillage des arrêts et gares a été établi.

Pour les gares routières, ils se sont substitués parfois aux transporteurs pour collecter l’argent à l’achat des billets et ne le leur versent qu’après avoir prélevé une certaine somme. Pour les arrêts de bus c’est simplement en prétextant avoir orienté les voyageurs vers les cars, qu’ils exigent des apprentis leur « mandat ». Mis sous pression par leurs maître-chanteurs, les apprentis finissent par payer pour s’en aller. Parfois et d’ailleurs souvent, ces conflits s’élargissent aux voyageurs car les « koxeurs » exigent d’eux de verser en plus du prix de leur transport, une autre somme pour leurs bagages. C’est à se demander si on doit voyager sans bagages au Sénégal ?

Dans le domaine des marchés agricoles, la situation est encore plus renversante. En effet, les « koxeurs » se sont installés comme intermédiaires entre les agriculteurs et les commerçants grossistes. En effet, réunis autour d’un bureau des « koxeurs » fixent les prix à leur avantage et ne manquent pas de créer des crises pour tirer encore plus de profits. Prenons l’exemple d’un producteur de tomates qui appelle le « koxeur » pour s’informer sur les tendances du marché. Celui-ci lui garantira un prix correct pour une commercialisation rentable. Entre temps, les « koxeurs » auront tirés les prix à la baisse par entente. Arrivé au marché, l’agriculteur n’aura que ses yeux pour pleurer mais …le coxeur n’est jamais bien loin. Il lui proposera de l’aider à vendre son produit moyennant au moins 300 francs le cageot de tomates de 2500 francs. L’agriculteur sera obligé d’accepter pour ne pas augmenter ses charges et diminuer sa marge. Rapidement, le « koxeur » fait un tour et revient avec la somme convenue pour l’achat du stock total tout en défalquant le « mandat ». Si l’agriculteur est patient, il assistera impuissant quelques minutes plus tard à la revente de sa marchandise par le « koxeur ». Le prix passera de 2500 francs à 4000 francs le cageot. En résumé le coxeur aura reçu 1800 francs de bénéfices par cageot pour une simple négociation sans pour autant avoir bougé du marché.

Ce qui est choquant dans tout cela, c’est que l’Etat comme la population a laissé cette activité perdurer. Comment comprendre que cette escroquerie se soit installée depuis si longtemps sans que l’autorité publique ne légifère ? Pourquoi cette race de prédateurs n’est pas éliminée ? D’année en année, cette corporation s’est développée comme un cancer pour ces secteurs stratégiques de l’économie sénégalaise et elle prend des allures de « mafia ». Son élimination permettrait aux transporteurs comme aux agriculteurs d’avoir une marge bénéficiaire correcte et aux consommateurs une baisse des prix sur les services et les produits agricoles. Au-delà, la lutte contre se phénomène peut s’inscrire dans celle contre l’enrichissement illicite et le racket. Le premier pas peut être franchi avec l’ouverture de la nouvelle gare routière des « baux maraîchers » sans « koxeurs » ni marchands ambulants.

 

Mohamed Seck

Mai 2014